Le travail gratuit des couturières : lettre à la Mairie de Nantes

Le travail gratuit des couturières : lettre à la Mairie de Nantes

Lancée le
1 mai 2020
Adressée à
Madame la Présidente de Nantes Métropole
Signatures : 780Prochain objectif : 1 000
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Pourquoi cette pétition est importante

Lancée par STATIONS SERVICES

Lettre ouverte sous forme de pétition

Lettre ouverte à l'attention de Madame la Maire de Nantes et présidente de Nantes Métropole Johanna Rolland.

Madame la Présidente, 

Nous souhaitons profiter de la célébration de la journée internationale des travailleur-euses afin de vous interpeller sur la réalité du travail gratuit des femmes en cette période de crise sanitaire.

En tant qu'association loi 1901, STATIONS SERVICES œuvre à développer des stratégies de décroissance, avec des valeurs écologiques et solidaires. Nous consacrons notre travail au réemploi local d'objets, matériaux et biens voués à la destruction, en les réintégrant, en circuit court, à un prix accessible aux citoyen-e-s nantais-e-s.

Nous avons pris conscience, bien avant la crise du COVID-19, que le monde nécessite des attitudes de changement. Nous savons l'urgence de répondre de façon direct aux besoins de décroître drastiquement dans la production de nouveaux biens de consommations courantes, nous avons compris aussi que la remise en circulation de ressources diverses pouvait aider les plus précaires. 

L'équipe de Stations Services s'est tout de suite mobilisée pour trouver des moyens de participer à la demande en matière de masques de protection. Nous avons tout de suite voulu mettre notre stock  (en tissus et mercerie)  à la disposition du bien commun pour aider à leur fabrication. Ainsi, près de 4000 masques et 250 blouses ont pu être fabriquées par des couturières volontaires et bénévolement.

Cependant, cette mise en pratique de la création de ces masques nous interroge. En tant qu'organisme porté par les valeurs de justice sociale et d'équité, il nous apparaît essentiel de rendre visible une réalité qui fait particulièrement sens dans cette crise sanitaire. Nous savons que ce sont les femmes les premières touchées dans la crise car elles sont majoritaires à servir les besoins en matière de santé en tant que personnel hospitalier, dans l'accompagnement des plus fragiles, les personnes âgées des EPHAD, dans les établissements scolaires pour les plus jeunes. 

Nous savons que les professions d'infirmières, d'aides soignantes, d'assistantes de vie, de caissières, de personnelles de soins sont majoritaires tenues par des femmes. Elles sont les premières à prendre des risques en matière de contamination malgré un salaire souvent proche de l'indécent. 

Il nous semble le bon moment d'interroger fortement le fait de demander aux femmes, couturières ici, de faire une fois de plus un travail gratuit. Les femmes, en cette période de crise, sont en effet les plus sollicitées et les plus fragilisées que ce soit dans la sphère du travail en première ligne (secteur de la santé et alimentaire) que dans celle de l'espace privé avec la charge des enfants déscolarisé.es (travail gratuit). 

Nous pensons à l'engagement des couturières amateurs bien entendu, mais aussi à toutes celles dont c'est le métier et qui n'ont pas hésité à participer à ce magnifique élan de solidarité en stoppant leur production lucrative afin de mettre en fabrication solidaire, masques et surblouses. Nous admirons et remercions ces femmes.

Si la gestion de cette crise du COVID-19 de nos politiques se veut humaniste, elle ne pourra pas se faire sans une prise de conscience des enjeux de classe et de genre. 

Il est temps aujourd'hui de prendre la mesure de ces questions en trouvant des solutions locales, faciles à mettre en œuvre. Si Nantes veut devenir la première ville non sexiste, il est temps que nous reconnaissions les talents de nos professionnelles locales à leur juste valeur. Voici quelques pistes :

  • Réserver, à l'avenir, une partie des achats de masques grand publics aux actrices locales de la confection textile. Le code des achats publics le permet jusqu'à hauteur de 25 000 € HT.
  • Mettre à disposition un local et des machines pour les couturières professionnelles en les rémunérant à la pièce fabriquée.
  • Créer une plate-forme de promotion de tous les studios de coutures professionnels qui vendent des masques au grand public en nous appuyant sur les chambres consulaires, les collectifs et les maires de la métropole.

Pour conclure si il s'agit de sauver, in fine, le secteur économique, il faut savoir de quelle économie nous voulons encore collectivement nous prévaloir. Nous pensons qu'elle doit être locale, résiliente, écologique, solidaire et non sexiste.

Au nom de toute l'équipe de STATIONS SERVICES, je vous prie d'agréer, Madame La Présidente de la Métropole, l'expression de nos salutations respectueuses.

(Merci à Virginie Jourdain pour la rédaction et Claire Normand pour la relecture et les propositions)

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