Contre l’entrée au Panthéon d’Arthur Rimbaud et Paul Verlaine

Contre l’entrée au Panthéon d’Arthur Rimbaud et Paul Verlaine
Chant de guerre provinciale
Contre l’entrée au Panthéon d’Arthur Rimbaud et Paul Verlaine et en réponse à une pétition antérieure
Appel au président de la République et aux enfants des Ardennes
La place d’Arthur Rimbaud et de Paul Verlaine dans la langue et la littérature françaises étant indéniable, il ne serait pourtant pas nécessaire de les faire entrer « conjointement » au Panthéon, cent-vingt-neuf ans et cent-vingt-quatre ans après la disparition de ces deux poètes, sous le prétexte d’effacer l’histoire dite homophobe de l’époque.
Les Français ne doivent pas tomber dans le piège du fameux politiquement correct.
Voici les raisons principales pour notre pétition contre l’entrée au Panthéon d’Arthur Rimbaud et Paul Verlaine :
Littéraire d’abord, parce que reconnaître les influences des écrivains célèbres ne voudrait pas dire les ramener tous à Paris. Paris, malgré ses universités et ses bibliothèques, n’est pas la France ; et Paris n’est pas la seule ville où il y a de la littérature. Arthur Rimbaud est incontestablement poète des Ardennes (le patois ardennais est d’ailleurs assez présent dans son œuvre) ; Paul Verlaine, malgré ses activités parisiennes, a lui aussi connu les Ardennes. Les Ardennes, comme toutes les autres régions longtemps soumises à l’appellation de « province », comptent ; alors pourquoi faire venir Rimbaud, la fierté carolopolitaine et ardennaise, à Paris, au détriment des sentiments régionaux ?
Morale ensuite. Les deux poètes sont bien enterrés dans leurs caveaux familiaux, comme il faut.
Il faut préciser qu’Arthur Rimbaud n’est pas seulement à côté de ce déplorable Paterne Berrichon : il est avant tout avec sa sœur Vitalie, morte à l’âge de dix-sept ans et pour qui le cœur d’Arthur a été gravement blessé ; avec sa mère Vitalie Rimbaud-Cuif, à qui il ne cesse d’écrire depuis l’Afrique ; son grand-père maternel, Jean-Nicolas Cuif, qui trouve son prénom dans celui de notre Jean-Nicolas Arthur Rimbaud ; la petite sœur Isabelle, qui, malgré son union avec Paterne Berrichon, reste la personne à laquelle Arthur pense à chaque fois qu’il écrit et celle qui l’accompagne côté de son lit de mort. Ces êtres-là, même respectivement, comptent beaucoup plus que ce Paterne Berrichon qu’Arthur Rimbaud n’a pas connu ; de séparer ainsi la famille serait horrible pour eux comme pour nous les enfants ardennais. Quant à Paul Verlaine, il ne s’agit pas d’une question de caveau familial, mais plutôt de l’entretien du cimetière. Pour la France, la patrie, qui trouve son étymologie dans le mot latin pater, qui signifie père de famille, n’est-il pas mieux de laisser reposer dans leurs propres familles ses enfants chéris ?
Économique encore, mais pas que. Ceci est aussi une question de l’opposition entre Paris et la province.
La mentalité qui veut relier l’honneur à la capitale n’est pas saine, et la ville de Paris en souffre aussi bien que le reste du pays. Paris est surpeuplée, saturée, depuis bien longtemps ; les autres villes, surtout celles de petite taille, tombent dans l’oubli. Et c’est surtout le cas des Ardennes, belle région qui ne voit pourtant que la fugue de ses enfants : qui sait aujourd’hui que la Sorbonne porte le nom de Robert de Sorbon, natif de Sorbon, petite commune des Ardennes ; et que Louis Hachette, fondateur de la maison d’édition Hachette, est né à Rethel, à quarante-cinq kilomètres de Charleville-Mézières ?
Telle est la triste vérité de la province : c’est comme si elle ne comptait plus. En ce qui concerne la ville natale de Rimbaud, que le poète déteste, bien sûr, dans son adolescence mais à laquelle il ne cesse de revenir, l’initiative de le faire entrer au Panthéon ne serait que négative pour Charleville-Mézières, que la plupart des gens connaissent grâce à Rimbaud et à Rimbaud seul. Pourquoi tuer la province pour Paris ?
Politique enfin. Pourquoi enfin ? Parce que la politique devrait être la chose qui compte le moins quand on parle de la littérature pure. Aussi, ce ne serait pas pour le simple geste de faire entrer « conjointement » Rimbaud et Verlaine que l’homophobie disparaîtrait. La sexualité, qui est tout d’abord personnelle, n’est pas une chose à vendre au public ; ce n’est pas la surreprésentation que les personnes de la communauté LGBTQ+ cherchent, mais la véritablement compréhension et la normalisation, et ni l’une ni l’autre se fait du jour au lendemain. Nous ne prétendons pas connaître les intentions de notre aimable adversaire, et nous partageons son amour pour les deux poètes ; mais une telle initiative politiquement correcte risque d’apporter plus de malheurs que de fruits.
Pour toutes ces raisons, nous sommes convaincus que de laisser reposer Arthur Rimbaud et Paul Verlaine là où ils sont, est et restera la bonne solution. Des plaques commémoratives, des visites guidées à Paris, en mémoire des deux poètes ? Pourquoi pas. L’entrée parallèle au Panthéon ? Non, merci.